Orsted s’effondre en Bourse après un plan à 8 milliards

Le géant danois des énergies renouvelables chute de près de 30 % à Copenhague après l’annonce d’une augmentation de capital massive.
Un coup de massue sur les marchés

Lundi matin, le titre Orsted a plongé de 28,9 % à la Bourse de Copenhague, effaçant en quelques heures plusieurs milliards d’euros de capitalisation. À l’origine de cette débâcle : l’annonce d’une augmentation de capital de 60 milliards de couronnes danoises, soit environ 8 milliards d’euros. Cette opération, qui représente presque la moitié de la valeur boursière actuelle de l’entreprise (130 milliards de couronnes), a immédiatement été perçue par les investisseurs comme un signal de grande fragilité financière. La réaction a été d’autant plus violente que la dilution pour les actionnaires existants s’annonce massive.

Orsted, qui s’est reconverti des énergies fossiles vers l’éolien et le solaire, justifie cette levée de fonds par la nécessité de renforcer un bilan sous tension. Les difficultés à céder une partie du projet Sunrise Wind, combinées à une conjoncture défavorable sur le marché éolien offshore américain, ont créé un besoin de financement supplémentaire évalué à 40 milliards de couronnes. L’État danois, actionnaire majoritaire à 50,1 %, participera à l’opération, qui doit donner au groupe la flexibilité nécessaire pour mener à bien ses projets d’ici à 2027.

Le produit de l’émission doit financer un programme colossal : 8,1 gigawatts de nouvelles capacités éoliennes offshore d’ici à 2027, soit l’équivalent énergétique de cinq réacteurs EPR de Flamanville. Une ambition qui exige des moyens considérables, dans un environnement où les marges se sont effondrées sous l’effet de la hausse des coûts de construction, de l’inflation sur les matières premières, et de la remontée des taux d’intérêt.

Les vents contraires d’une industrie sous pression

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier a ravivé les tensions sur le secteur. Hostile de longue date aux énergies renouvelables, l’ancien président a signé dès le 20 janvier un décret suspendant les prêts fédéraux aux nouveaux projets éoliens offshore, en attendant un examen économique et environnemental. Cette décision a directement fragilisé Orsted, qui compte sur deux projets américains d’envergure : Revolution Wind (704 MW, prévu pour 2026) et Sunrise Wind (924 MW, prévu pour 2027). L’incertitude réglementaire pèse lourdement sur la valorisation du groupe depuis le début de l’année.

Comme ses concurrents, Orsted subit la flambée du prix des matières premières — notamment le polysilicium pour le solaire — et les surcoûts sur les chantiers offshore. Les projets en mer sont particulièrement sensibles à l’augmentation des coûts de transport, d’installation et de maintenance. En mai dernier, l’entreprise avait déjà retiré le projet Hornsea 4, au large de l’Écosse, en raison d’une explosion des coûts et de risques opérationnels accrus, entraînant des charges exceptionnelles de 470 à 600 millions d’euros.

Les analystes, comme ceux de la Royal Bank of Canada, pointent que Sunrise Wind est déjà soumis à une forte pression sur les rendements. La difficulté à céder une part de ce projet reflète la défiance des investisseurs face aux incertitudes politiques et économiques. Orsted relie directement ces échecs aux “évolutions défavorables du marché éolien offshore américain”, un marché jadis perçu comme stratégique mais désormais plombé par les signaux politiques négatifs et le manque de soutien financier fédéral.

Les défis d’un leader en quête de cap

L’augmentation de capital d’Orsted équivaut à lever près de la moitié de sa capitalisation actuelle, ce qui entraîne mécaniquement une dilution sévère. Si l’État danois participera à l’opération, les investisseurs privés voient leur part de capital réduite, ce qui explique en grande partie la violence de la sanction boursière. Pour les marchés, cette levée de fonds traduit un risque structurel plus profond que de simples difficultés conjoncturelles.

Orsted, longtemps considéré comme un modèle de transition énergétique réussie, doit désormais convaincre qu’il peut exécuter ses projets sans compromettre sa solidité financière. La communication du groupe insiste sur la nécessité de “préserver une capitalisation adéquate” et de maintenir la flexibilité budgétaire. Mais la succession de mauvaises nouvelles — retrait de projets, retards, surcoûts — fragilise la confiance des investisseurs et des partenaires financiers.

Malgré ces vents contraires, Orsted maintient le cap sur son programme éolien offshore, misant sur une reprise de la demande mondiale et sur la transition énergétique à long terme. Entre 2025 et 2027, l’entreprise déploiera un portefeuille parmi les plus ambitieux du marché, dans l’espoir que la conjoncture — réglementaire comme économique — se retourne en sa faveur. Un pari risqué, mais nécessaire pour rester dans la course face à des concurrents comme Vestas, Iberdrola ou RWE.



Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.