Commerce français contre Shein : une action en justice inédite pour concurrence déloyale
Shein, géant chinois de la fast-fashion et du commerce en ligne, est désormais visé par une procédure judiciaire portée par douze fédérations françaises du commerce et de l’industrie, soutenues par près d’une centaine de marques. Elles accusent l’entreprise de pratiquer une concurrence déloyale en ne respectant pas les réglementations auxquelles sont soumis les acteurs implantés en France. Shein dénonce de son côté une tentative de boycott déguisée.
Une coalition inédite de fédérations et de marques
Le Conseil du commerce de France (CDCF), à l’origine de l’initiative, a été rejoint par des organisations représentant de nombreux secteurs : habillement, textile, grande distribution, vente en ligne, bijouterie, jouet ou encore franchise. Parmi les enseignes impliquées figurent notamment Coopérative U, Promod, Monoprix, Grain de Malice ou encore Besson Chaussures.
Selon ces organisations, le modèle économique de Shein repose sur le « non-respect des réglementations françaises », notamment en matière de conformité des produits, de fiscalité, de droit du travail et de contraintes environnementales. Elles affirment vouloir rétablir des conditions de concurrence équitables et demandent réparation pour les préjudices économiques subis.
« Cette action est d’une ampleur inédite », soulignent les fédérations, qui réclament également le versement de dommages et intérêts proportionnés à leurs pertes.
Shein dénonce des accusations « infondées »
Le groupe asiatique a réagi rapidement par la voix d’un porte-parole. Shein juge les accusations « infondées » et regrette que les acteurs français « privilégient la confrontation judiciaire plutôt qu’un dialogue constructif ». Le géant du e-commerce estime même que cette initiative s’apparente davantage à « une tentative de boycott » qu’à une démarche juridique solide.
Ce n’est pas la première fois que l’entreprise est dans le viseur des autorités ou des professionnels. Déjà critiquée pour son modèle ultrarapide, son impact environnemental et la cadence de mise en ligne de milliers de références quotidiennes, Shein doit désormais répondre à une action judiciaire coordonnée.
Le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence en charge de la procédure
L’affaire est portée devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence, où les filiales irlandaises de Shein ont déjà été assignées, notamment dans le cadre de la liquidation judiciaire d’Olly Gan, une marque française de vêtements pour hommes. Selon l’avocat des fédérations, Me Cédric Dubucq, les organisations demanderesses interviendront volontairement à l’audience de mise en état prévue le 12 janvier.
Cette étape permettra au tribunal de fixer le calendrier complet de la procédure. Une audience de plaidoirie pourrait se tenir d’ici douze à dix-huit mois, selon l’avocat.
Un nouveau front dans les débats autour de la fast-fashion
Cette action en justice intervient dans un contexte où la fast-fashion et les plateformes asiatiques sont de plus en plus critiquées pour leur impact sur l’économie locale et sur l’environnement. Shein, en particulier, est dans le collimateur du gouvernement français, qui examine depuis plusieurs mois différents leviers pour réguler ce modèle ultra-flexible et très compétitif.
Avec cette procédure, les acteurs français du commerce espèrent ouvrir un nouveau front juridique pour contraindre Shein à se plier aux règles et, surtout, pour limiter les distorsions de concurrence qu’ils jugent insoutenables.