De nouvelles pistes de taxation des hauts revenus ?

Le contexte social dans lequel est plongé le pays a rendu le gouvernement fébrile, hésitant, dépendant de la parole -rare- du chef de l’Etat. Il s’agit pour l’exécutif de revenir sur le devant de la scène avec ses propositions et de ne pas rester en défense contre celles des Gilets Jaunes.

Si le gouvernement tente actuellement de détourner le débat sur les lenteurs administratives et le coût de la fonction publique, thèmes très peu ou jamais présentés comme tel par les Gilets Jaunes, il n’en reste pas moins que les demandes de répartition des richesses dans le pays ressortent en permanence. Dans ce contexte la suppression de la taxe d’habitation pour les 20% les plus riches est un sujet apte à tendre les débats. Hier, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux a explique à la radio que le maintien de la taxe était « sur la table ». « La promesse de campagne de la supprimer pour 80 % des Français (…) est mise en place » et le gouvernement se penche désormais sur « la question des 20 derniers pour cent », a expliqué monsieur Griveaux.

Du côté de Bercy, on affirme qu’« il y a des sujets déjà votés par le Parlement, comme la suppression de 80 % de la taxe d’habitation, la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune [ISF] en impôt sur la fortune immobilière [IFI] ou la “flat tax”. Mais la situation politique a changé, et le grand débat national doit traiter de fiscalité. On ne va pas arriver avec des réponses toutes faites ». Si le gouvernement ne compte pas arriver avec des réponses toutes faites, il ne compte pas non plus écouter les demandes des gilets jaunes.

L’économie réunionnaise paralysée

Alors que l’on vit le dixième jour de mobilisation des gilets jaunes à la Réunion, l’île est paralysée. La ministre des Outre-mer, Annick Girardin, a assuré une baisse immédiate du prix des carburants pour tenter de stopper la colère. Elle a également annoncé se rendre sur place mercredi.

Le mouvement ne faiblit pas et ses conséquences commencent à se faire ressentir avec des rayons de commerces qui se vident. Une partie des grandes surfaces mais aussi des stations-essences sont fermées ou bloquées. D’après la chaine de télévision Réunion la 1ére, au moins quarante barrages sont en place sur l’île ce lundi. Depuis quelques jours un couvre-feu a été mis en place à cause de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les gilets jaunes.

« L’Île de la Réunion est en arrêt total, toute l’économie est bloquée » assure au Figaro Nadia Ramassamy, députée Les Républicains de la 6ème circonscription de La Réunion. La députée explique que « les gilets jaunes bloquent l’entrée des grandes surfaces et font pression pour que les commerçants ferment » ce qui provoque un début de tension sur l’approvisionnement. Certains produits de première nécessité, comme le riz ou la viande, sont introuvables, précise Nadia Ramassamy, qui explique que l’Île de la Réunion « importe la plupart de ses produits ». Elle déclare également que « les agriculteurs ne peuvent même plus nourrir leurs animaux ou écouler leurs viandes ».

La situation donne de grandes inquiétudes à Bernard Stalter, président du réseau français des chambres de métiers et de l’artisanat. « L’île de la Réunion est le département le plus touché par les ‘gilets jaunes’. J’ai eu énormément de retours d’artisans – bouchers, charcutiers, boulangers, coiffeurs -, et ils souffrent énormément. La situation est catastrophique ».

 

Les Gilets Jaunes misent tout sur les raffineries

Après la mobilisation de ce week-end qui a rassemblé au moins 240.000 personnes samedi sur 2.000 points de rassemblements, les Gilets Jaunes se sont heurtés à la fin de non-recevoir d’Edouard Philippe qui assuré maintenir le cap de la politique fiscale du gouvernement. En réaction, bloquer les raffineries devrait être leur nouvel objectif afin de paralyser l’économie du pays pour forcer la majorité à céder.

La nouvelle méthode pourrait bien faire reculer le gouvernement. En 2016, la CGT avait organisé la panne sèche du pays et les forces de l’ordre avaient dû reprendre une par une les raffineries. Ce matin, cinq dépôts étaient totalement bloqués :  les dépôts de Vern-sur-Seiche, près de Rennes, de Portes-lès-Valence, dans la Drôme, de Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône, de Port de la Palice-La Rochelle, et de Lespinasse, près de Toulouse.

D’après un représentant des Gilets Jaunes, il y aurait en réalité plus de dépôts bloqués, au moins une dizaine. Il assume la nouvelle stratégie : « On veut désormais bloquer les raffineries et les dépôts industriels pour avoir un impact économique ». D’autres objectifs sont bloqués comme des péages ou des ronds-points. Laëtitia Dewalle, représentante des Gilets Jaunes dans le Val-d’Oise, assument également le blocage de ces points économiques importants et mise sur la convergence des forces : « Un changement de stratégie ? Non, nous maintenons nous aussi le cap, et avec fermeté. On avait dit que des routiers nous rejoindraient, ainsi que des agriculteurs, tout ça est en train de se mettre en place ».

Sur BFMTV, l’éditorialiste économique Nicolas Doze confirme l’intérêt de la stratégie : « Il est certain que c’est en bloquant ce type de sites que vous paralysez le pays, que vous provoquez des pénuries et des files d’attente devant les stations, c’est très très efficace ».